De America[s] à “Springsteen : Deliver Me From Nowhere”

Celles et ceux qui nous suivent savent que nous adaptons des films en français, c’est-à-dire que nous écrivons des VF. La dernière en date, Springsteen : Deliver Me From Nowhere, sort le mercredi 22 octobre 2025 au cinéma.

Ce biopic, réalisé par Scott Cooper (Crazy Heart) et porté par Jeremy Allen White (The Bear), raconte l’écriture et l’enregistrement de l’album Nebraska par un Bruce Springsteen aussi inspiré que torturé. Il s’agit d’une plongée passionnante dans le processus créatif et l’univers du “Boss”, comme on l’appelle déjà en cette année 1982. Et d’autant plus intéressante que nous étions alors nous-mêmes en train de réfléchir à notre quatrième roman.

Celles et ceux qui nous suivent savent aussi que Bruce Springsteen est un des personnages de notre roman America[s] (2022). C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles Disney nous a choisis pour adapter le film en français. Merci encore à eux ! 🙏🙏 Dans le livre, il est une sorte de grand frère pour notre jeune héroïne un peu perdue pour qui il se prend d’affection, peut-être parce qu’elle lui fait penser à sa petite sœur. Il lui parle de son père, de ses propres voyages, de la peur de décevoir après un premier album plutôt bien accueilli…

Pour être au plus près de la vérité et aussi justes que possible, nous avions lu son autobiographie ainsi que d’autres ouvrages, et visionné des heures d’interviews. Ainsi, au moment de commencer à travailler sur le roman, nous le connaissions très bien. Puis il y a eu tout le temps de l’écriture… Autant vous dire que le jour où nous avons entamé notre travail sur la VF, nous avons eu le sentiment de retrouver un vieil ami, avec qui nous avions traversé une partie des États-Unis ! Et nous avons pris le même plaisir à le faire parler à nouveau.

Si vous avez lu America[s], nul doute que vous serez heureux de retrouver le “Bruce” que nous y décrivions. Et si vous ne l’avez pas encore lu, mais que vous découvrez le film, il y a fort à parier que vous aurez envie de partir à la rencontre du Boss quelques années plus tôt…

Lui (elle me montre le gars bronzé en débardeur, assis devant moi), c’est Bruce, le chanteur. T’as peut-être entendu parler de lui, à Philly ? Bruce Springsteen. Il a sorti un album incroyable ! Et il vient d’avoir une super critique dans le Rolling Stone de ce mois-ci. (Elle lui tape sur l’épaule.) C’est une star ! »
Bruce se retourne et me dit :
« Ouais, je suis une star, mais c’est dommage, y a qu’elle qui est au courant ! »


« T’écris une chanson ?
— Non, elle est écrite. Je retravaille juste un couplet. On commencera par celle-là demain.
— Ah.
— Tu veux l’entendre ?
— Ouais, bien sûr ! »
Il se remet à jouer, avant de préciser :
« Ça s’appelle “4th of July, Asbury Park”. »
Il joue encore un peu et chante, susurre presque :
«Sandy…»


Je me demande où est Bobby Jean et pourquoi il est parti du jour au lendemain, sans rien dire à personne. Je me fais la réflexion à voix haute que…
« Y a des gens, comme ça, qui sont nés pour tailler la route… Comme Bobby Jean… »
Je regarde Bruce :
« Comme toi.
— Comme toi », il me répond.
Peut-être.
« “Née pour Tailler la Route”, c’est le nom indien que mon ami Navajo, celui que t’as vu, m’a donné. »
Il me regarde.
« Né pour tailler la route… Ça me parle… »
Il prend un petit carnet dans la poche arrière de son jean et note l’expression¹.

¹. « Born to Run » en anglais. Titre d’une chanson de Bruce Springsteen et de l’album éponyme, sortis en 1975.


« Tu sais ce qui me foutait la trouille la nuit quand j’étais petit ?

— Non.
— Mon vieux. Quand il avait picolé et qu’il cassait tout dans la maison… Je l’entendais hurler après ma mère… C’était pas
un mauvais bougre, et je crois qu’il nous aimait, mais quand il avait bu… »
Je savais bien qu’il comprenait, quand j’ai parlé de mon père, l’autre fois.